top of page
L'enregistrement du XIXe au XXIe siècle
L'une des particularités que le cornet à pistons possède, c'est son développement en parallèle avec l'enregistrement. On a la chance de pouvoir écouter des cornettistes jouer sur des cornets d'époque. Nous allons donc retracer l'évolution de l'enregistrement en présentant quelques extraits d'œuvres jouées par des  grands noms du cornet.

La découverte de l'enregistrement

Avec les progrès industriels de plus en plus marqués, Léon Scott de Martinville a l'idée de représenter les oscillations des ondes sur un support graphique. Il crée, en 1857, le "phonaugraphe" composé d'un pavillon. Lorsqu'une personne parle dedans, un stylet porté par une membrane reliée à l'embouchure du pavillon reproduit un sillon ondulé. De Martinville n'a cependant pas utilisé cette machine pour reproduire un son.
C'est en 1877 que Charles Cros, poète, décide de laisser la trace de l'ondulation sur un cylindre. Un sillon est gravé en profondeur sur la surface. L'onde pouvait être reproduite en repassant un stylet par dessus. L'enregistrement est né.

L'invention prend alors le nom de phonographe.

L'évolution des machines et le cornet  à pistons

Même si Charles Cros a amélioré l'idée de De Martinville, il n'aura pas eu l'aubaine de construire son projet. C'est le nom de Thomas Alva Edison qu'on retiendra comme l'inventeur de ce principe, avec son invention appelée "Tin foil phonograph" (1878). Cependant, le public n'est pas conquis par cette invention.
Alexander Graham Bell, intéressé par l'invention d'Edison, perfectionne, avec l'aide de Charles Summer Tainter, le support de la machine et conçoit le cylindre de cire interchangeable (1883).  Leur machine "Treadle Graphophone" est mise sur le marché.
Par la suite, Edison propose un nouveau modèle à cylindres de cire et moteur rotatif (1889), le "Phonographe Edison modèle Class M".
En activant le son en bas à droite de la vidéo, vous pourrez écouter une polka jouée par un duo de cornets à pistons datant du début du XXe siècle. L'un des cornettistes interprétant la polka est le célèbre Herbert Lincoln Clarke (biographie et photo présentées dans la vidéo). 

L'oeuvre se compose de différents thèmes, joyeux comme sombre. Les deux cornets solos, accompagnés d'un orchestre, sont au centre de l'interprétation. Tout au long de l'exécution, les solistes jouent en homorythmie. Pour conclure, ils se répondent et terminent l'oeuvre ensemble.

Il est très simple de comprendre, qu'à cette époque, l'utilisation du coup de langue chez les cornettistes était très appréciée. Les compositeurs l'exploitaient, parfois avec excès, pour dévoiler le talent de certains cornettistes.  
 
Cette polka a été enregistrée sur un cylindre en cire de la fabrique Edison.

La machine utilisée est le phonographe "Edison standard" de 1898, il a la capacité de lire les cylindres de 2 et 4 minutes.
En parallèle, Emile Berliner, allemand émigré aux États-Unis, invente, en 1887, un nouveau support sonore : "le disque". La gravure utilisée est différente de celle d'Edison. En utilisant comme matériau le zinc, le disque de Berliner est une sorte de matrice ce qui signifie qu'on peut reproduire un nombre infini d'exemplaire à partir d'un disque. Berliner commercialise sa première machine à disque nommée  "Grammophon" destinée aux enfants. 
Une multitude d'inventions vont voir le jour comme "les poupées parlantes" d'Edison, le "Bébé Phonographe" d'Émile Jumeau, ... Il y a une forte concurrence entre les inventeurs.  
En France, les frères Pathé montent leur compagnie de distribution en 1896. En quelques années, ils dominent le marché de la phonographie et du cinéma français. En se complétant, ils créent un phonographe qu'ils appellent "Céleste". Il permet de sonoriser les films muets.
Vous pouvez écouter la polka "Gouttes d'eau" pour cornet à pistons d'Alexandre Petit interprétée par lui-même.

Dans cet enregistrement, Alexandre Petit montre sa virtuosité en enchainant des séries de notes très rapides rendues possible par la création des pistons. On peut entendre aussi des ornements comme le gruppetto ou les trilles. Alexandre Petit utilise aussi beaucoup les coups de langue ternaires. 

Petit a enregistré sa polka sur un cylindre Pathé. C'est avec un "phonographe à cylindres Pathé modèle n°2" datant de 1900 que vous pouvez écouter l'exécution de son œuvre. 
Enregistrement d'un solo de cornet à pistons au stand Edison.

Illustration venant d'une revue de la société Edison
Fred Gaisberg, collaborateur d'Emile Berliner, traverse le monde entier pour recueillir les voix les plus célèbres. En présentant un catalogue d'enregistrements prestigieux en disque, ce dernier prend l'avantage et détrône le cylindre grâce à son stockage plus facile, sa meilleure durabilité ainsi que sa résistance.
En 1906, les frères Pathé mettent en vente leur première machine utilisant des disques de gravure verticale (comme les cylindres).
Deux systèmes de disques vont se présenter :

- La gravure latérale utilisant des aiguilles d'acier. Un aiguille n'est utilisée qu'une seule fois car lors de l'écoute, celle-ci s'abîme. Il est nécessaire de la changer à chaque utilisation pour ne pas endommager le disque.

- La gravure verticale utilisant le saphir. Lors de l'écoute, le saphir ne s'abîme pas. Par contre, après un certain nombre d'écoute, le cylindre ou le disque est inutilisable. 
Polka pour piston "L'Étoile du Casino" de Guille interprété par un cornettiste de la Garde Républicaine.

En étant attentif, on remarque que le cornettiste octavie plus bas lors d'une reprise d'un des thèmes. En effet, pour combler l'abondante demande, il est nécessaire aux musiciens de rejouer plusieurs fois l'œuvre sur la même journée, la copie n'existant que depuis peu. Le cornettiste, probablement fatigué de sa journée, a préféré jouer l'octave du dessous pour ne pas devoir refaire tout l'enregistrement.

Cette fois-ci, l'enregistrement s'est fait sur un disque Pathé. La machine est un "gramophone à disques Pathé modèle n°12".
À cette époque, il est difficile pour l'enregistrement de se standardiser. La concurrence présente dans le domaine ne permet pas une standardisation des composants. Par exemple, il est nécessaire pour un cylindre Edison d'être écouté sur une machine Edison. Autrement, la taille du cylindre ne sera pas appropriée à celle d'une autre machine et la vitesse de lecture ne sera pas correcte. Vous remarquerez donc que les cylindres et disques précédant la standardisation (après la Seconde Guerre mondiale) proviennent de la même société que les gramophones et phonographes. 
Les appareils de lecture ainsi que le disques varient énormément. Pour un disque, les diamètres varient entre 12 et 50 centimètres, ils peuvent tourner de 65 tours à 135 tours par minute.
Au début du XXe siècle, le disque prend son envol. La musique prend sa place au cinéma, à la radio et se diffuse dans le monde entier. La vitesse du disque se standardise à la vitesse de 78 tours.
L'enregistrement continue d'évoluer. Columbia lance un nouveau support en 1948 : le "disque microsillon". La matière première manque dans les années qui suivirent la Seconde Guerre mondiale. On cherche alors une matière permettant de créer des disques demandant moins de dépenses. La Vinylite répond à la demande. Le microsillon, plus léger, permet d'enregistrer jusqu'à vingt-cinq minutes par face. De plus, l'emploi d'un saphir, à longue durée de vie, convient totalement. 

Le 33 tours fait son apparition. Il permet d'écouter une œuvre complète au contraire du 78 tours qui n'avait que quatre minutes par face.  Le 45 tours, commercialisé par la RCA, fait son apparition pour la variété étant donné qu'il s'agit de morceau de durée plus courte qu'une oeuvre classique.
La "Marche Royale de L'Histoire du soldat" de Stravinsky est une oeuvre très connue dans le répertoire du cornet à pistons (L'orchestre symphonique). Cet extrait est joué par le cornettiste Delbos sous la direction de Stravinsky.

C'est un disque de la fabrique Columbia. Il y est inscrit "Trompette ; DELBOS". On entend pourtant très bien la sonorité d'un cornet à pistons. La machine est un gramophone "La Voix de son Maître" datant de 1957.
Le morceau "Perles de Cristal" de H. Hamel est interprété au cornet à pistons par Maurice André, considéré par un grand nombre de musiciens comme "le meilleur trompettiste de tous les temps". 

Une des grandes qualités de ce musicien, comme on peut l'entendre dans cette exécution, c'est l'aisance de sa souplesse et des coups de langue. Lorsqu'il joue, tout paraît très simple et naturel. C'est l'une des caractéristiques appréciées de Maurice André. 

Disque 33 tours du label "His Master's Voice" de 1983. Le nom de l'album est "Alpenglüh'n". Ce disque est écouté sur une machine "Kenwood" datant de 1988.
En 1955 survient la suppression du 78 tours pourtant bien instauré mondialement. L'objectif était sans doute de pousser les consommateurs vers le disque microsillon. 

Le magnétophone, lui, prend place dans les foyers dans les années cinquante. Il a été imaginé en 1898 par Valdemar Poulsen sous forme d'enregistrement magnétique sur fil de fer souple. Cette technique est utilisée par des compagnies telles que AEG et Telefunken dans les années trente et son utilisation dans les studios dans les années quarante. Cette forme d'enregistrement permet aux studios de stopper la prise de son à un moment voulu et de ne pas devoir reprendre tout depuis le début. 

Des styles de musique comme le rock et le swing, aimés par les jeunes, émergent et prennent possession du vinyle au détriment du 78 tours qui part aux oubliettes.

La "Musicassette" fait son apparition en 1963. Inventé par la fabrique Philips, elle reste très populaire jusqu'au début des années 2000. Dans les années 80, Sony, Philips et Hitachi inventent un nouveau support, le "Compact-Disc". Il peut emmagasiner jusqu'à 74 minutes, une vraie révolution. Dix ans plus tard, la vente de CD dépasse celle du vinyle. Moins fragile, d'une meilleure qualité que la cassette, les bruits du microsillon ne sont plus présents, le CD se standardise durant une dizaine d'années. En 1997,  l'apparition du mp3 bouleverse tout. Ecouter un morceau devient très facile, il suffit d'un ordinateur, d'internet et tout devient possible. Plus besoin d'avoir un espace de stockage, le mp3 ne prend aucune place physiquement. Tout d'abord les gens écoutent leur musique sur lecteur mp3 (exemple : "iPod") et aujourd'hui sur leur téléphone portable.

S'il y a une centaine d'années, il était possible d'écouter quelques minutes de musique sur un disque à l'aide d'une machine, aujourd'hui, avec un téléphone, il est possible d'écouter des heures de musique.
Sur le lien ci-dessous, vous pouvez écouter une version mp4 récente de la polka composée par Alexandre Petit. On constate une grosse évolution de la qualité sonore par rapport à l'interprétation de Petit en début de chapitre. De plus, on aperçoit que les cornettistes du XXe siècle se débrouillaient extrêmement bien avec des cornets à pistons d'époque. 

Divers airs 

"Ah ! Cupid from Prince Ananias" interprété par Herbert L. Clarke avec accompagné d'un orchestre en 1909.

Disque Victor Record sur la machine La "Voix de son Maître".
"Coquerico", polka pour piston de 1913.

Disque Pathé sur un gramophone "Pathé modèle n°12".
"Le Candidat Muet" de Charlus, monologue comique avec piston de 1896.

Disque Pathé sur gramophone "Pathé modèle n°12".
Des extraits de Bourvil chantant "C'est l'piston" (l'piston: le cornet à pistons) du film "Blanc comme neige" de 1948. Accompagné d'un orchestre, il manipule à merveille la langue française pour produire des coups de langue. Bourvil, de son nom André Raimbourg, appris le cornet à pistons dans sa jeunesse. Il intègrera même la musique du 2e régiment d'infanterie au cornet. 
Ce chapitre est inspiré de PHONO Museum de Paris, 53, boulevard de Rochechouart 75009 Paris.
Vidéo "C'est l'piston" 
https://www.youtube.com/watch?v=jIUFKYkQMGA&themeRefresh=1
bottom of page